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Confidences à voix haute de l'auteur de Malo Terminus:

 

" Le projet est né anecdotiquement d'un agacement: celui de voir mon épouse s'absorber des vacances estivales entières dans des romans policiers! Jean-Christophe Grangé, dont j'ai par ailleurs adoré La Ligne Noire, est devenu, sans le savoir, mon involontaire rival des soirs d'été!! L'ignoble individu... avec cette suffisance tranquille de triomphateur, en forme de photo d'auteur sur d'énormes bouquins me promettant à de longues heures d'oubli aux yeux de celle que j'aime!

Le défi m'a semblé évident et est parti d'une fanfaronnade, dont je n'ai pas tout de suite mesuré les conséquences: tu vas voir! moi aussi je peux t'écrire un polar... ton polar... dont tu ne prétendras pas, comme toujours, avoir deviné l'issue avant terme...

Qu'avais-je dit là? Il me fallait m'exécuter, faute de paraître définitivement ridicule et plus vain encore que ces auteurs, dont je me plaisais à dire qu'ils n'en étaient point, au regard de ceux dont j'enseignais les textes à mes étudiants, en cours de littérature! Quelle compétence pouvais-je prétendre faire prévaloir dans un genre que je ne fréquentais guère alors qu'au cinéma et dont la forme "écrite" se bornait, dans mon expérience de lecteur, à de lointains souvenirs jubilatoires post-adolescents de San-Antonios dévorés sur un mode rabelaisien? Michel Butor, dont l'Emploi du temps était, cette année-là, au programme des classes CPGE, m'a sauvé de cette impasse; c'était écrit, démontré, au détour d'un article critique apparemment anodin: il n'est pas de vie sans désir de sens; pas de désir de sens, sans quête, sans enquête... et dans notre vie moderne, dont le tempo est souvent donné par la sphère anglo-saxonne, la littérature de quête, celle qui structure nos représentations du monde, répond à notre besoin de Sens, trouve sa forme dans un genre moins mineur que ne le prétend l'institution littéraire: le roman policier, forme épurée et admise de nos interrogations en quête de réponses...

J'avais donc là mon sauf-conduit: tout roman, et donc Mon roman, serait policier!

Je passerai sous silence la lente gestation de la conception romanesque, le temps qu'il a fallu dégager pour mener à bien ce projet d'écriture dans les interstices d'une vie professionnelle et familiale déjà bien saturée, les railleries-taquineries de mes proches, de ma chère et tendre, de mes enfants grandissant et épousant, amusés, la cause de leur mère dans ce défi: alors, il verra le jour quand, ce roman que tu nous promets?! papa est un auteur qu'on ne lira pas de son vivant...etc... j'en passe et des meilleures!

Je passerai sous silence les deux nuits que ce nouveau rival, cet autre moi, m'a volées d'attentions conjugales; je n'étais plus jaloux, mais simplement inquiet, inquiet du Verdict: Elle a aimé! Pas "pour me faire plaisir", "aimé et dévoré comme elle dévore les Grangé, Nicci French, ou autres Fred Vargas"!... Pari réussi donc? Agitation familiale, amicale: on me sollicite, on veut lire... mais "c'est bon, même très bon... tu devrais songer à te faire éditer..."

Je passerai sous silence ce nouveau parcours du combattant, que j'ai affronté avec la naïveté d'un "jeune" auteur, tout de même quadra! Ces envois aux éditeurs, avec des lettres circonstanciées, tentatives maladroites très certainement d'un énième anonyme plaidant à des oreilles blasées et débordées la cause improbable de son texte! Peut-on avoir la chance d'être édité sans soutien, mot d'introduction? J'irai même plus loin, a-t-on seulement une chance d'être lu quand on envoie via la poste un manuscrit d'anonyme aux éditeurs institutionnels? C'est le parcours d'abord fiévreux, puis petit à petit désabusé de nombreux "écrivants"... puisqu'on a eu l'audace d'envisager sur la place publique ce qu'on aurait a priori humblement laissé au fond d'un tiroir, on a fini par y croire. Le parcours pré-éditorial, les rares "touches", les directrices de collection qui "doivent vous rappeler car le projet, séduisant, n'a pas convaincu tout le comité de lecture", vous ramènent vite à une évidence: dans cette jungle, vous n'êtes rien et avez peu de chances de devenir quelque chose, et encore moins quelqu'un. A force de se ruiner en enveloppes, frais de réexpédition (en chèques uniquement mon bon Monsieur!), on finit par laisser ses manuscrits mourir de leur belle mort quelque part dans les antichambres de la lumière éditoriale!

Et puis, ce à quoi l'on ne croyait plus, finit par arriver; une amie libraire s'étonne que vous ne connaissiez pas tel directeur d'édition... certes vous n'aurez pas l'aura ni les moyens des grands éditeurs parisiens, mais la maison d'édition, de renommée régionale, tente et réussit, depuis quelques années, une percée dans le domaine des fictions policières...

Voilà donc Malo Terminus, au bout du parcours... Gilles Guillon, qui dirige la collection Polars en Nord et Polars en région chez Ravet-Anceau, s'est transformé en ma bonne fée! Un simple changement de titre (dicté par une prudence de bon aloi: mon "Tuer n'est pas jouer", pourtant très logique,ayant été adopté, il ya moins d'un an, par une romancière éditée par une maison qui avait lu et refusé mon texte-!?-) pour finaliser l'édition, et voilà l'objet de cette petite histoire personnelle entre vos mains... Je n'en reviens toujours pas: une partie de moi ne m'appartient plus! Si en plus, cela pouvait vous toucher...??..."

tout un roman!
© 2009